La ligne de fuite

Toute l’équipe du journal « Le Décadent » est réunie dans un troquet. Ils attendent la lecture par Adrien de sa dernière poésie. Baju, directeur de la publication, est sous le charme. Il propose que ces sonnets soient publiés dans le journal comme s’il s’agissait d’un Rimbaud inédit. Ce n’est pas la première fois et Baju estime qu’il s’agit autant d’un hommage que d’une provocation. Malgré quelques réticences de certains écrivains de la Rédaction, et la gène visible d’Adrien, le poème est ainsi publié.

« Le Décadent » n’en est pas à son coup d’essai mais le scandale est tel, cette fois, que certains auteurs veulent quitter le journal.

Baju se rebiffe et décide de contre-attaquer en retrouvant Arthur Rimbaud dont personne n’a de nouvelles. Lui a une piste qui semble mener à Aden, au Yémen. Il propose à Adrien de l’aider dans sa quête.

Par legoffe, le 1 janvier 2001

Publicité

2 avis sur La ligne de fuite

La poésie n’a pas pris. En tout cas celle de l’histoire. Je ne sais pas… elle ne m’a pas porté autant que je me l’imaginais. Ou peut-être est-ce parce que j’avais lu et entendu énormément de bien de La ligne de fuite que je n’ai pas été autant séduit ? C’est ce que j’ai en tout cas ressenti, bien que j’apprécie d’ordinaire ces albums où l’exercice consiste à intégrer un personnage fictif à de l’historique.

Le dessin, par contre, m’a beaucoup plu. J’aime ce coup de crayon et ce rendu un peu brouillon qui emprunte à des styles comme on peut les rencontrer dans Messire Guillaume (Dupuis, Repérages) ou dans L’idole dans la bombe (Futuropolis). J’ai aimé les couleurs, j’ai aimé ces oscillations entre un graphisme assez fouillis et un autre beaucoup plus réaliste (certaines scènes sont de toutes beauté, notamment celles dont la qualité du dessin de Benjamin Flao se rapproche de celle des extraits de ses carnets de voyages). J’ai aimé aussi les quelques dessins et aquarelles en pleines pages. J’ai été amusé enfin par ces caricatures animalières de Baju, de Du Plessys et de Verlaine. Elles sont dessinées dans un style qui fait très « illustrations de journaux de l’époque » et elles servent bien le récit que les hallucinations – en tous genres – du héros font rebondir.

La ligne de fuite m’a donc bien plu, au final. A moi de la relire pour mieux appréhender ce à quoi je n’ai pas accroché lors de ma première lecture. Pour cela, je conseillerais presque de lire le cahier supplémentaire avant la bande dessinée. Afin que la poésie opère mieux encore !

Par Sylvestre, le 14 décembre 2007

Il m’a suffit d’ouvrir ce livre pour tomber sous le charme. Et comment ne pas l’être devant la splendeur des dessins de Benjamin Flao ? Connu pour ses carnets de voyage (il a été lauréat du prix Lonely Planet 2003 à Clermont-Ferrant pour ses Carnets de Sibérie), il fait une entrée remarquée dans le monde de la bande dessinée avec cette œuvre hors norme.

Cet album, véritable hommage à Arthur Rimbaud, est une poésie à lui tout seul, tant dans ses textes que dans ses crayonnés magnifiques, mis en couleur de très belle façon et dévoilés à travers un découpage impeccable.
Et comme Futuropolis fait toujours bien les choses, le choix du papier (un beau mat) met le tout en parfaite valeur. C’est un grand et beau livre qui vaut bien son prix.

L’histoire, elle, est de la même veine. On parle poésie, on respire poésie. L’hommage de Dabitch à ces auteurs du Décadent, en cette fin des années 1880, est réussi. Le lecteur partage les réunions de ces écrivains en quête de révolution littéraire et nous plonge dans une époque où le lyrisme avait une si belle place dans la société que des journaux lui étaient dédié. Les dialogues sont de belle facture et le récit comprend de nombreux extraits de poèmes des grands de l’époque, parfaitement intégrés à l’histoire, cela va sans dire.

Nous voici donc à parcourir Paris puis à faire, avec Adrien, le voyage vers Rimbaud et le Yémen. Je ne vous dirai bien sûr pas où cela va le mener mais je peux au moins préciser que ce livre n’est pas un récit d’aventure. Il va avant tout parler de la quête d’un homme vers sa propre personnalité et ses propres troubles. Le voyage que nous propose ce livre est d’abord intérieur et certaines scènes basculent ainsi du réel vers l’allégorique.

Si tout n’est pas vrai dans le récit, l’ensemble est basé sur des faits réels, la plupart des écrivains protagonistes ayant vraiment existé (c’est le cas de Baju ou de Du Plessys). De même, Rimbaud a vraiment disparu de France à cette époque pour chercher, a priori, fortune en Afrique est exact. Une documentation très intéressante complète d’ailleurs l’histoire en fin d’album, parlant de la fin de la carrière de Rimbaud et des « décadents ». On trouve aussi quelques crayonnés de Flao lors de ses voyages sur place.

Ce très bel album est donc un hommage appuyé à la poésie, une bande dessinée lyrique que l’on peut déjà considérée comme à part dans la production actuelle. Pour être si bien née, elle est forcément l’œuvre de deux personnes à la sensibilité exacerbée.

Par Legoffe, le 10 septembre 2007

Publicité